Que trouve-t-on à la pompe du premier roman particulièrement réjouissant d’Alexandre Labruffe ? Une station-service, un pompiste, son entourage barré de la boussole, une japonaise adepte d’un drôle d’art martial, des paires de jumelles, une clef usb, des pistes qu’on suit, qu’on abandonne, le temps de sourire du regard du narrateur sur son monde. C’est en fin observateur qu’il évoque des instants de vie dans ces lieux de passage, d’aisance, de recharge et de sandwichs en triangle.

Fidèle à son personnage de Par les routes, dont les échappées en auto-stop n’ont pas d’autres buts que d’entendre des histoires et de rencontrer des visages, Sylvain Prudhomme a choisi de vous montrer Chronique d’un été de Jean Rouch et Edgar Morin. Un documentaire où le cinéaste et l’ethnologue questionnent des Parisiens en 1960, alors que la guerre fait rage en Algérie : « Comment vis-tu ? Es-tu heureux ? Comment te débrouilles-tu avec la vie ? »

Les Mureaux. Cité ouvrière sur le bord de la Seine dans les Yvelines. Point de départ d’une enquête au long cours qui a duré pas moins de sept ans, De cendres et de braises dresse un portrait politique et intime d’une banlieue populaire en pleine mutation. Pour rendre visibles ceux que l’on tend à oublier, se trouve au coeur du dispositif la nécessité de donner la parole aux habitants et d’écouter leurs récits de vie.

Pour avoir créé la première consultation « souffrance et travail » en 1997 à l’hôpital de Nanterre, la psychologue clinicienne et psychanalyste Marie Pezé est sans doute l’une des mieux à même de jauger l’étendue et la diversité des maux liés à l’activité professionnelle. Pendant plus de dix ans s’y sont succédé des personnes que le travail a meurtri. Cora, l’héroïne du dernier roman de Vincent Message, aurait pu être de ceux-là.

C’est l’histoire d’un ami retrouvé puis perdu à nouveau. Cet homme qui vit heureux avec femme et enfant dans une petite ville du sud aime les voyages en auto-stop. Il disparaît régulièrement pour des expéditions sans but. D’aires d’autoroutes en départementales, de villages en campings sauvages, il explore une France peu pittoresque…

La soixantaine venant et le sida étant passé par là, emportant avec lui nombre de personnes qu’il aimait, James a remisé Lady Prudence dans les placards du ranch où il vit désormais. Lui qui fut une célèbre drag queen dans les années quatre-vingt rencontre un soir Victor dans un bar à New York. Ex-membre d’un gang, hétérosexuel et jeune père de famille, celui-ci cherche à trouver sa « créature », et faire sa place dans le milieu drag.

Fanny Vella et Sophie Lambda sont deux jeunes autrices qui, avec des styles graphiques très différent, ont abordé le thème de la relation toxique, qu’elle s’accompagne ou non de violence conjugale.

Après le démantèlement de la jungle de Calais, Lucille s’interroge sur le sens à donner à sa vie ; la cause qui la mobilisait ayant disparu. Quel est cet horizon qui lui manque ? Dans l’attente de le retrouver, Lucille s’installe auprès d’Anatole, un vieil homme féru d’ornithologie. Ce duo devient trio à l’arrivée de Loïk, échoué à proximité et accueilli sur ce radeau de fortune. Après quelques aveux, la cohabitation se teinte de méfiance.

L’étreinte n’aura duré que quelques secondes, mais l’empreinte laissée est de celles qui vous poursuivent à vie. Nastassja Martin, anthropologue spécialiste des peuples arctiques et ancienne élève de Philippe Descola, explore les zones imprécises où l’humain dialogue avec les mondes de l’animisme et du chamanisme. Se tenant entre deux mondes – l’occidental et l’indigène –, elle raconte dans Croire aux fauves ce qu’il adviendra de sa violente rencontre avec un ours sur une montagne du Kamtchatka en Russie.

Le dernier livre de Céline Lapertot témoigne d’une grande confiance dans le pouvoir de la littérature. Dans sa capacité à mettre des mots sur des choses impensables et inadmissibles, de faire en sorte que la pensée reprenne le pouvoir de nous les faire admettre, pour enfin réussir à vivre avec.